Frédéric Barberousse de HOHENSTAUFEN, élu empereur

       A la mort de son père, Frédéric le Borgne, Frédéric, surnommé plus tard « Barberousse » devient, à 25 ans, duc de Souabe. Il participe en 1147 avec son oncle l'empereur à la 2ème croisade qui tourne au désastre. Le jeune duc se distingue néanmoins par son courage.

             En 1153, il visite l'Alsace et se rend sur le Mont Sainte-Odile, le couvent de notre sainte, que son père avait détruit cinquante ans plus tôt. Il va faire reconstruire le couvent tant vénéré à l'identique et nomme d'abord comme abbesse une de ses parentes, Relinde, puis, vingt ans plus tard, Herrade de Landsberg dont la renommée d'encyclopédiste, en composant notemment le Hortus deliciarum, la première encyclopédie réalisée par une femme, dépassera largement les frontières de la région. Le Mont Sainte-Odile et l'Alsace doivent beaucoup à celui qui deviendra un empereur de légende. 

             Car le jeune Frédéric, est élu empereur du Saint Empire Germanique, en 1155 à 31 ans, à la mort de son oncle Conrad III. Cette élection a été réalisée promptement ! On peut imaginer que la famille avait tout préparé à l’avance et avait dû s’arranger avec les autres princes germaniques en leur cédant de nouveaux territoires et éviter ainsi d’interminables discussions.

           Pour être couronné par le pape Adrien IV qui traîne les pieds, Frédéric 1er lève une armée et descend lui-même à Rome. Après d’âpres discussions, il est finalement couronné par le pape, le 18 juin 1155 dans la Basilique Saint-Pierre. Mais les romains se révoltent. Il est obligé de réprimer la révolte et se fâche aussi avec le pape. Son règne commence mal !

          Si ce brave jeune homme a bien été gâté par les astres à sa naissance, il se retrouve, en fait, à la tête d’un empire ingouvernable ! Imaginez, les territoires allant de la mer du Nord jusqu’au nord de l’Italie, incluant l’Autriche, la Bohème, la Corse et la Sardaigne, sont bien trop vastes pour un seul homme. De plus, il hérite d’une situation ingérable, à savoir la lutte à mort avec les Papes dans cette querelle des investitures qu’avait lancé notre pape alsacien Léon IX. Il va passer sa vie à cheval et devoir se battre sur tous les fronts pour préserver ses convictions et son héritage ! 
 

          Pour l’Alsace c’est une période faste car elle bénéficie d’énormes privilèges du fait de la présence de l'empereur car celui-ci dépense beaucoup d’argent qui ruisselle vers les différentes corporations. Frédéric transforme le château de la Moder à Haguenau en résidence impériale fortifiée où il fait garder les fameux insignes de la couronne. Il y installe des chevaliers fidèles qui tiennent la frontière au nord dans les châteaux construits par son père.

           Il demande à l’évêque de Strasbourg de construire le château du Haut-Barr à Saverne pour se protéger des Lorrains. Il fait aussi construire le château de Kaysersberg pour contrôler la vallée de la Weiss et verrouiller l’accès au col du Bonhomme. 

          Comme Charlemagne, l’empereur Frédéric Ier « Barberousse », est doté d’une personnalité exceptionnelle et règne pendant 37 ans sur cet immense empire. A 34 ans, en juin 1156, Frédéric a épousé Béatrix de Bourgogne, qui n’avait que 10 ans (elle est l’héritière du comté de Bourgogne depuis la mort de son père) pour empêcher l’oncle de cette dernière de lui ravir le comté ! Evidemment, le comté tombe dans l’escarcelle des Hohenstaufen. Béatrix a son premier enfant à seize ans. Elle en aura 11 autres dont 5 mourront avant elle. En 1167, Frédéric 1er veut la faire couronner impératrice à Rome. Le pape Alexandre III ne répondant pas à ses demandes, Frédéric n'hésite pas ! Il convoque son armée et part pour la ville sainte qu'il assiège et prend d’assaut ! Alexandre III s’enfuit et laisse la place à l’anti-pape Pascal III qui couronne Béatrix. Mais la belle impératrice meurt trop tôt en 1184 peut-être en accouchant de sa dernière fille mort-née, à l’âge de 38 ans !

           Frédéric 1er est embourbé dans les problèmes italiens où il s’obstine à vouloir mettre au pas les cités du nord qui se révoltent sans cesse contre son autorité. Il s’épuise à relancer d’incessantes campagnes (six entre 1155 et 1175) qui ne rapportent pas de réelles avancées mais sont très coûteuses en vies humaines. En 1183, il fait des concessions au pape et aux villes lombardes pour signer la paix de Constance qui maintient l’Italie du nord dans le Saint-Empire.

          A la Pentecôte en 1184, à 62 ans, il convoque une diète formidable (assemblée des princes) à Mayence pour adouber ses fils Henri et Frédéric. Plus de 40 000 chevaliers se rendent à Mayence qui doivent camper sur les îles en bordure du Rhin. Tous les princes et l'intégralité de l'élite catholique viennent lui rendre hommage. C’est un véritable triomphe et la consécration d’un règne hors du commun.

           En 1187, le sultan Saladin a repris Jérusalem et infligé de terribles défaites aux catholiques. Le pape Grégoire VIII lance un appel pour la 3ème croisade. Le roi de France, Philippe Auguste et le roi d’Angleterre, Richard Cœur de Lion mettent leurs différends de côté et « prennent la croix ». Frédéric 1er lève une armée de 20 000 hommes et désigne son fils Henri VI (23 ans) comme régent de l’Empire .
          Frédéric part en 1189 avec son armée pour Jérusalem. Barberousse a provoqué Saladin en duel par une lettre du 26 mai 1188, dont le rendez-vous est fixé dans la plaine égyptienne de la Zoan. (Etait-ce bien raisonnable à 66 ans ?) Après deux batailles victorieuses contre les musulmans, dont son dernier combat à la bataille d'Iconium, Frédéric se noie le 10 juin 1190 dans le fleuve Saleph (actuellement Göksu,), en Anatolie, avant qu'il n'ait pu rencontrer Saladin. On rapporte qu'il a voulu se rafraîchir, après la bataille, en prenant un bain (?), ou son cheval se serait affolé lors de la traversée du fleuve et Frédéric aurait été emporté par le poids de son armure. 

          Son fils, Henri VI, appelé le cruel (1165-1197) fait régner la terreur pendant son court règne. C’est lui qui retient prisonnier Richard Coeur de Lion, roi d’Angleterre, à son retour de la même croisade, au château de Haguenau et au château de Trifels (au nord de l’Alsace) pendant 14 mois. Il réclame une rançon de 100 000 marc pesant d’argent (plus de 2 tonnes d’argent équivalent à deux années de recettes fiscales de l’Angleterre !). Henri a besoin de beaucoup d'argent pour constituer une armée : il veut aller conquérir le royaume de Naples et de Sicile lorsque son beau-père meurt en 1189 (il avait épousé Constance la fille du roi de Sicile en 1186). 
           Henri VI s’empare facilement de la Sicile et se fait couronner Roi de Sicile en décembre 1194 à Palerme. Il se livre à un horrible massacre de tous les prétendants et opposants qui avait élu un autre roi. Le 26 décembre 1194, Constance donne naissance à un garçon prénommé Frédéric comme ses ancêtres. 

           Henri, fort de son succès en Sicile, se sent pousser des ailes et lance l’appel à une nouvelle croisade à Bari. Il veut reconquérir la Palestine mais pense surtout prendre le contrôle de l’empire bysantin. Mais il meurt d’une maladie (?) en Septembre 1197 à Messine, à trente-deux ans. Son fils Frédéric devient ainsi l’héritier de cet énorme empire à l'âge de trois ans.