20 Mai 2020
Angelo Branduardi - Chad Gadya (1526) apparaît, pour la première fois, dans une Haggadah imprimée à Prague au XVIe siècle.
A 7 kms au sud de Molsheim se trouve le village fortifié de Rosheim qui est aujourd’hui un très joli village à l’allure des plus paisible comme il y en a beaucoup le long de la route des vins sur les premiers contreforts des collines vosgiennes. L’histoire de ce petit village a été souvent très mouvementée car placé à l’intersection des vallées de la Bruche, de l'Ill et du Rhin. La cité avait notamment servi de quartier général aux « Armagnacs ou Ecorcheurs » en 1444 pour mener leurs raids de désolation dans toute l’Alsace.
La petite ville est surtout réputée pour son église romane, Saint Pierre et Saint Paul, et pour l'unique maison romane d'Alsace qui existe encore de nos jours.
La vie a aussi été tout sauf paisible pour Jossel (Joseph Loans) qui a vécu à Rosheim de 1514 à 1554. De religion juive, il est né en 1478 à Haguenau où son père s’était réfugié après avoir fui les massacres des juifs à Obernai. Ce « passeur d’humanité » va lutter pendant 50 ans pour aider ou sauver ses coreligionnaires à une période où ils sont impitoyablement persécutés.
Jossel n'a que six ans quand son père meurt. Il est élevé par la famille de sa mère à Haguenau et reçoit une solide éducation juive. Adulte, Jossel s'installe à Mittelbergheim où il gagne sa vie comme prêteur d'argent et en faisant de petites affaires. En 1507, les bourgeois d'Obernai expulsent leurs Juifs. Jossel entreprend alors un voyage de 800 km à cheval pour plaider leur cause devant l'empereur Maximilien à Vienne. A 29 ans, il a une chance inouïe : l'Empereur du Saint-Empire Germanique le reçoit et, se laissant convaincre par le plaidoyer de Jossel, ordonne au Magistrat d'Obernai de reprendre ses Juifs ! C'est un premier succès extraordinaire qui propulse Jossel sur le devant de la scène. Les juifs d’Alsace le voient comme leur Messie et il devient naturellement leur porte-parole. Il va alors défendre envers et contre tout la vie et les moyens de subsistance de tous les juifs d’Alsace puis de toute l’Europe et va risquer sa vie pendant plus de quarante ans sur les routes.
En 1514, les Juifs de Mittelbergheim sont accusés de profanation d'hosties. Jossel réussit à prouver leur innocence. Il s'installe ensuite à Rosheim où il va demeurer jusqu'à sa mort.
En France, c'est l'apogée du règne de François 1er, des châteaux de la Loire et de l'immense artiste Léonard de Vinci.
"Josselmann", lui, parcourt des milliers de kilomètres à pied ou à cheval, entre les Flandres et la Bohème, intervient avec beaucoup de courage auprès de l’empereur Maximilien, puis auprès de son petit-fils et successeur, Charles Quint. Muni d’un sauf-conduit de l’empereur, il fait preuve tout au long de ses 40 ans de qualités humaines exceptionnelles qui lui permettent d’obtenir autant de succès et de restaurer la dignité des juifs d'Europe en cette période particulièrement cruelle. Il devient un interlocuteur privilégié d"un des plus grands empereurs germaniques, Charles Quint, et une confiance mutuelle naît entre les deux hommes. Jossel était sûrement habité par son Dieu pour avoir pu réaliser cette oeuvre moralisatrice à une époque où la vie ne tenait qu’à un fil.
Le 15 avril 1544, Charles Quint, sur les instances de Jossel, accorde aux Juifs du Saint-Empire le "Grand Privilège". C'est la charte la plus libérale et la plus généreuse jamais octroyée aux Juifs, leur accordant la sécurité dans leurs déplacements et leurs travaux. Jossel bénéficie alors d'un prestige considérable parmi ses coreligionnaires, qui lui donnent le titre de chef et porte-parole des Juifs du pays.
Il meurt en 1554, à Rosheim dans son lit. Mais il n'existe aucune trace de sa tombe. Vers la fin de sa vie, Jossel a rédigé ses mémoires. L'original hébreu est conservé au British Museum de Londres.
1525 - Guerre des Paysans - Archives Alsace
En 1525 une révolte paysanne, la "Guerre des Paysans" éclate en Alsace. A Rosheim, c'est Ittel Jorg, surnommé Jerry, qui prend la tête d'une partie du mouvement. La ville échappe à une destru...
https://sites.ina.fr/archives-histoire-alsace/focus/chapitre/3/medias/R19028815
C'est également l'époque d'un peintre hors du commun : Raphël
Extraits des mémoires extraordinaires de Josselmann de Rosheim traduit par Simon SCHWARZFUCHS :
« En 1471 des hommes cruels sortirent d'Endingen (Bade) et capturèrent mes trois oncles, frères de mon père, de mémoire bénie. Ce dernier parvint à s'échapper avec l'aide de Dieu. Les hommes cruels torturèrent mes oncles et les contraignirent à avouer ce qui n'était pas ils furent brûlés vifs et sanctifièrent le Saint Nom. Les martyrs de Pforzheim furent également brûlés à cette époque. Quant au frère de mon beau-frère, il mourut sur la roue, à Haguenau. Que Dieu veille sur leur âme, au jardin d'Eden. Amen.
Me trouvant à Wurzburg pour défendre mes frères injustement accusés d'avoir provoqué la mort d'un enfant trouvé noyé, j'ai trouvé ce livre. Je résolus alors de consigner par écrit ce que mon père m'avait raconté au sujet de leur persécution en 1476. Lui et ma mère, ainsi que leurs enfants, s'enfuirent d'Obernai et se réfugièrent dans les châteaux de Baren et de Lutzelheim, où ils passèrent une année entière, souffrant de la faim et de la soif. Les assassins tuèrent nos frères de Sélestat, Bergheim, Kaisersberg, Kestenholz, Ammersweiler, Durkheim, Colmar et Ensisheim, menaçant de noyer ceux qui ne se convertiraient pas. Mon père m'a raconté que soixante âmes, hommes et femmes, défièrent l'épée et l'eau et sanctifièrent le Nom Saint. Seuls, six hommes apostasièrent.
Mais ce n'est pas tout : le massacre fut suivi d'un froid intense, et les Juifs, qui s'étaient réfugiés dans des cavernes, furent obligés d'en sortir et de descendre dans la ville de Durckheim. Des délateurs les dénoncèrent et quatre-vingts de nos frères se préparèrent à la mort. Ils implorèrent le Seigneur, qui vint à leur aide. Le général annonça qu'il leur accordait la vie sauve contre paiement de huit cents florins avant le lendemain midi. Or il n'y avait plus qu'un Juif dans le pays : Juda Bamis de Mulhouse. Tous les autres Juifs avaient disparu. Les uns étaient morts, les autres exilés : tous avaient perdu leurs biens. Lorsque cet homme juif apprit la mauvaise nouvelle, il déchira ses vêtements, se revêtit d'un cilice et couvrit sa tête de cendres. Il rassembla tous ses biens et envoya son serviteur Mardochée avec le prix du sang: 800 florins (60 000 euros). Ce dernier arriva juste avant l'expiration du délai. Les Juifs avaient été attachés deux par deux. Les vêtements de Banet, le premier, lui avaient déjà été arrachés, et le bourreau s'apprêtait à le décapiter, lorsque la puissante voix de Mardochée se fit entendre : « Ne touche pas à ce Juif, car j'apporte la rançon. » Les officiers prirent l'argent et envoyèrent les captifs à Juda Bamis. Leur bienfaiteur pourvut à leurs besoins, et ils ne le quittèrent qu'une fois les bandes dispersées. Quant à la descendance de cet homme juste, elle fut prospère et respectée (Mon neveu, fils de ma sœur, Isaac ben Ichiel Bamis, descend de cette famille)… Par la suite, Dieu se vengea de ceux qui avaient versé le sang de ses serviteurs.
La suite de ces mémoires extraordinaires en suivant le lien ci-dessous :
Les mémoires de Josselman de Rosheim
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